Le portage salarial représente aujourd’hui une solution de plus en plus prisée par les professionnels en quête d’indépendance tout en conservant les bénéfices du statut salarié. Apparu dans les années 1980, ce mode d’emploi hybride séduit environ 100 000 salariés en France et connaît une expansion remarquable avec un chiffre d’affaires estimé à 2,4 milliards d’euros en 2024. Cette forme d’emploi offre une réponse adaptée aux enjeux actuels du marché du travail, permettant aux consultants de conjuguer autonomie professionnelle et sécurité sociale.
Comprendre le fonctionnement du portage salarial
Pour saisir pleinement ce dispositif, il convient d’aborder une définition claire du portage salarial. Il s’agit d’une relation contractuelle tripartite dans laquelle une entreprise de portage salarial signe un contrat de travail avec un consultant autonome, appelé également salarié porté. Ce dernier effectue des missions pour le compte d’entreprises clientes tout en bénéficiant du statut de salarié. L’entreprise de portage gère les aspects administratifs et financiers, notamment la facturation des prestations, le versement du salaire et la déclaration des charges sociales, permettant ainsi au consultant de se concentrer pleinement sur son métier et le développement de ses compétences.
Ce dispositif a été reconnu juridiquement pour la première fois en 2008 par la loi modernisant le marché de l’emploi, puis son cadre légal a été précisé par l’ordonnance du 2 avril 2015 qui figure désormais à l’article L. 1254-1 du Code du travail. Le secteur s’est structuré progressivement avec la création de la FeNPS en 2004, puis du PEPS en 2012. La sécurisation du statut de salarié porté est intervenue en 2016, suivie en 2017 par la mise en place d’une convention collective spécifique au portage salarial. Aujourd’hui, le secteur compte près de 700 entreprises de portage et prévoit un essor considérable avec des projections de la FEPS annonçant plus de 500 000 emplois d’ici 2025 et potentiellement 1 250 000 emplois à l’horizon 2030.
Les acteurs et leurs rôles dans la relation tripartite
Le fonctionnement du portage salarial repose sur trois acteurs principaux qui entretiennent des relations contractuelles distinctes. Le salarié porté constitue le premier acteur de cette relation. Il s’agit d’un consultant indépendant qui prospecte et négocie ses missions de manière autonome. Ce professionnel conserve une grande liberté dans le choix de ses clients, la fixation de ses tarifs et la réalisation de ses prestations. Il doit néanmoins respecter certains critères d’éligibilité, notamment proposer des prestations de services intellectuels telles que le conseil, la formation, l’audit, la finance, le marketing, le management ou encore la traduction. La législation impose également un niveau de qualification minimal validé par un diplôme de niveau Bac +2 ou par une expérience professionnelle d’au moins trois ans.
L’entreprise de portage salarial représente le deuxième acteur essentiel de cette relation. Elle joue le rôle d’employeur légal du consultant et prend en charge l’intégralité de la gestion administrative et comptable. Ses missions incluent la facturation des prestations auprès des entreprises clientes, l’établissement des bulletins de salaire, le versement de la rémunération au consultant, les déclarations sociales et fiscales ainsi que le suivi du compte rendu d’activité fourni par le salarié porté. En contrepartie de ces services, l’entreprise de portage prélève des frais de gestion calculés généralement entre 5 et 10 pour cent du chiffre d’affaires généré. Plus de 300 sociétés de portage existent actuellement en France pour accompagner plus de 90 000 freelances portés.
L’entreprise cliente constitue le troisième pilier de cette relation tripartite. Il s’agit de l’entité qui fait appel aux services du consultant pour répondre à des besoins ponctuels ou des missions occasionnelles. L’entreprise cliente signe un contrat de prestation avec la société de portage qui définit les termes de la mission, notamment sa durée, son tarif et ses modalités d’exécution. La durée de la prestation ne peut toutefois pas excéder trois ans selon la réglementation en vigueur. Il est important de noter que l’entreprise cliente ne peut recourir au portage salarial pour remplacer un salarié gréviste ou pour des services à la personne. Le non-respect de ces obligations expose l’entreprise cliente à une amende forfaitaire de 3 750 euros, montant qui passe à 7 500 euros en cas de récidive.
Les étapes d’une mission en portage salarial
Le déroulement d’une mission en portage salarial suit un processus bien défini qui débute par la signature d’une convention de portage entre le consultant et l’entreprise de portage. Cette convention cadre les modalités générales de collaboration et fixe les conditions dans lesquelles les missions pourront être réalisées. Le consultant engage ensuite sa propre prospection commerciale pour identifier et négocier des opportunités de mission auprès d’entreprises clientes potentielles. Cette phase de prospection constitue un élément clé du portage salarial puisqu’elle conditionne directement l’activité et la rémunération du consultant.
Une fois qu’une mission a été identifiée et négociée, un contrat commercial est signé entre l’entreprise de portage et l’entreprise cliente. Ce document définit précisément les prestations à réaliser, le tarif convenu, la durée de la mission et les conditions de sa réalisation. Parallèlement, un contrat de travail est établi entre l’entreprise de portage et le consultant. Il peut s’agir d’un contrat à durée déterminée adapté aux missions courtes avec une limite de 18 mois renouvelable deux fois, ou d’un contrat à durée indéterminée plus approprié pour les consultants ayant des missions régulières et souhaitant faciliter leurs démarches bancaires. La durée légale de travail s’établit à 151,67 heures par mois ou 218 jours par an, avec une possibilité d’atteindre 228 jours par an moyennant un avenant spécifique.
Le consultant réalise ensuite sa mission pour le compte de l’entreprise cliente en conservant son autonomie professionnelle. Il doit fournir régulièrement un compte rendu d’activité à la société de portage pour attester de la réalisation effective des prestations. À l’issue de la mission ou selon les modalités convenues, l’entreprise de portage facture les honoraires à l’entreprise cliente. Après réception du règlement, la société de portage prélève ses frais de gestion et procède au versement du salaire au consultant après déduction des cotisations sociales et charges patronales. En moyenne, le salarié porté perçoit entre 45 et 55 pour cent de son chiffre d’affaires en salaire net, ce qui correspond généralement à environ la moitié du montant facturé au client. Le taux journalier moyen se situe aux alentours de 300 euros par jour, avec un tarif journalier minimum fixé à plus de 230 euros hors taxes pour respecter le salaire minimum conventionnel.
Les avantages du portage salarial pour les consultants

Le portage salarial présente de nombreux atouts qui expliquent son attractivité croissante auprès des professionnels indépendants. Ce dispositif permet notamment d’entreprendre sans prendre les risques associés à la création d’une structure juridique classique. Le consultant n’a pas besoin de créer une société, d’immatriculer une entreprise individuelle ou de gérer les contraintes administratives et comptables qui en découlent. Cette simplicité administrative représente un gain de temps considérable et permet au consultant de se consacrer exclusivement au développement de son activité et à la réalisation de ses missions.
Le portage salarial offre également la possibilité de tester un projet professionnel rapidement et de développer son activité à son rythme. Cette souplesse s’avère particulièrement intéressante pour les personnes en reconversion professionnelle, un profil de plus en plus fréquent sachant que selon l’AEF, 64 pour cent des Français seraient favorables à une reconversion. Les jeunes diplômés peuvent aussi bénéficier de cette formule pour acquérir une première expérience professionnelle en toute sécurité. Les cadres, les créateurs d’entreprise, les retraités et les demandeurs d’emploi trouvent également dans le portage salarial une solution adaptée à leur situation et à leurs objectifs professionnels. Plus de 800 métiers sont aujourd’hui accessibles via le portage salarial, à condition qu’ils correspondent à des prestations intellectuelles et ne relèvent pas de métiers réglementés ou de services à la personne.
Protection sociale et sécurité du statut salarié
L’un des avantages majeurs du portage salarial réside dans la protection sociale complète dont bénéficie le consultant. Contrairement aux statuts d’entrepreneur individuel ou d’auto-entrepreneur, le salarié porté profite de l’ensemble des garanties associées au statut de salarié classique. Il cotise ainsi à l’assurance maladie, à l’assurance chômage et aux régimes de retraite, lui assurant une couverture sociale comparable à celle d’un salarié traditionnel. Cette sécurité financière constitue un élément rassurant pour les professionnels qui souhaitent exercer en toute indépendance sans renoncer aux protections essentielles.
Le salarié porté cotise également au titre de la formation professionnelle et peut mobiliser son Compte Personnel de Formation pour développer ses compétences ou envisager une évolution de carrière. L’accès au chômage en cas d’interruption d’activité représente un autre atout considérable qui distingue le portage salarial des autres statuts indépendants. La rémunération du consultant est garantie et versée régulièrement sous forme de salaire, ce qui facilite les démarches administratives telles que les demandes de prêt bancaire ou de location immobilière. Le salaire minimum en portage salarial doit représenter entre 70 et 85 pour cent du plafond de la Sécurité sociale, soit environ 2 517,13 euros, voire 2 900 euros bruts par mois selon les sources, assurant ainsi un niveau de rémunération décent.
Par ailleurs, le salarié porté peut bénéficier de divers avantages sociaux proposés par son entreprise de portage. Ces avantages incluent notamment des titres restaurant, des chèques-cadeaux plafonnés à 193 euros pour certains événements listés par l’URSSAF, des chèques-culture pouvant atteindre 1 000 euros par mois, ainsi que des dispositifs d’épargne salariale comme le Plan d’Épargne Entreprise plafonné à 25 pour cent du revenu brut annuel dans la limite de 3 709,44 euros en 2024 ou le PERCO dont les versements ne peuvent dépasser 7 419 euros par an. Les montants versés sur ces plans peuvent être abondés jusqu’à 300 pour cent par l’entreprise de portage, ce qui représente le maximum légal autorisé. L’indemnité déjeuner de 20,70 euros est accordée les 55 premiers jours de chaque mission avant de laisser place aux titres restaurant.
Autonomie professionnelle et gestion administrative simplifiée
Le portage salarial permet au consultant de conserver une totale autonomie dans la conduite de son activité professionnelle. Il choisit librement ses missions, ses clients et ses honoraires, et négocie directement les conditions d’intervention avec les entreprises clientes. Cette indépendance dans la gestion opérationnelle représente un avantage considérable pour les professionnels qui souhaitent développer leur expertise dans un domaine particulier tout en gardant la maîtrise de leur emploi du temps et de leurs orientations stratégiques. Le consultant décide également de son organisation de travail et peut exercer en télétravail en bénéficiant de la prise en charge des frais de télétravail qui peuvent être fixes, variables ou exceptionnels.
Parallèlement à cette autonomie, le consultant délègue l’intégralité des contraintes administratives et comptables à l’entreprise de portage. Cette dernière se charge de la facturation des clients, du recouvrement des créances, de l’établissement des bulletins de salaire, des déclarations fiscales et sociales, ainsi que du suivi comptable de l’activité. Cette externalisation administrative libère le consultant de tâches chronophages et souvent perçues comme complexes, lui permettant de se concentrer sur son cœur de métier et sur le développement commercial de son activité. Le consultant n’a pas à se préoccuper des délais de paiement des clients puisque l’entreprise de portage assure généralement le versement du salaire selon un calendrier régulier.
Les frais professionnels engagés dans le cadre des missions peuvent être déduits du chiffre d’affaires avant le calcul des charges sociales. Ces frais incluent notamment les frais de mission tels que les déplacements, la restauration, l’hébergement, le matériel informatique, ainsi que des frais au forfait ou hors forfait selon leur nature. L’indemnité d’installation dans un nouveau logement peut atteindre 1 524,30 euros, majorée de 127,10 euros par enfant dans la limite de trois enfants. Cette optimisation fiscale permet d’améliorer sensiblement la rémunération nette du consultant. Pour les professionnels intervenant à l’international, le portage salarial propose également des solutions adaptées avec le statut de salarié détaché qui maintient la législation du pays d’origine ou le statut de salarié expatrié qui applique la couverture sociale du pays d’accueil.

